L’invisibilité des personnes âgées

___________________________________

René a 68 ans. Il est célibataire. Il a toute sa tête et a gardé intact son humour un peu cynique. Les connaissances qu’il a accumulées au cours de sa carrière d’ingénieur à la STIB pourraient encore être utiles aujourd’hui. Mais voilà, un problème de cheville l’a cloué sur une chaise roulante. Son manque d’autonomie physique l’a conduit à choisir une maison de repos. Il a le sentiment d’être devenu inutile. La crise du coronavirus lui a fait craindre le pire dans sa résidence, où personne n’était testé et où la liste des annonces de décès n’arrêtait pas de s’allonger. Le sentiment de ne plus compter pour personne, juste un peu de compassion.

La crise sanitaire a révélé le peu d’égard accordé à la vieillesse et à la mort. Une occasion de changer de regard sur la retraite et le grand âge à Bruxelles. Les seniors n’ont-ils pas été maintenus trop longtemps en maison de repos pour éviter la saturation des hôpitaux ? Les maisons de repos ne sont-elles pas trop souvent devenues un business comme un autre ? avec ses restructurations en vue d’une meilleure rentabilité ? La crise a montré que les métiers d’aide aux personnes sont essentiels et qu’ils doivent être mieux valorisés. Des soins à domicile optimalisés ne devraient-ils pas permettre aux personnes âgées de rester chez elle et au sein de leur entourage le plus longtemps possible ? Nous n’avons même pas été capables de gérer le deuil et d’enterrer dignement.

« Une société repose à la fois sur les vivants et les morts. On ne disparaît pas des mémoires, des souvenirs. La notion de transmission est donc fondamentale. Nous avons besoin de ces rites de passage pour continuer nos vies. La problématique du deuil fait partie des choses qui ont été très mal gérées durant cette crise, montrant une absence totale de préparation. Ce qui nous a conduit à enterrer les gens à la sauvette » affirme le sociologue Serge Guerin. « On ne peut pas faire des vieux des robots joyeux qui n’ont vocation qu’à être des consommateurs. Il ne faut pas se contenter d’occuper les seniors. Les personnes âgées doivent être les auteurs de leur vie. Elles doivent avoir la possibilité de s’engager dans des projets associatifs mais aussi de s’intégrer dans le milieu de l’entreprise ». Il en dit bien plus dans cette interview de L’Echo.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.